Prises de sons


« Lequel est le plus musical d’un camion qui passe devant une usine et d’un camion qui passe devant une école de musique ?? »

John Cage « Silence » Denoel
Enfants de Djanet, Algérie Photo : Michel Moglia

« Le savoir occidental tente, depuis vingt cinq siècles, de voir le monde. Il n’a pas compris que le monde ne se regarde pas, il s’entend. Il ne se lit pas, il s’écoute. Notre science a toujours voulu surveiller, compter, abstraire et castrer les sens, en oubliant que la vie est bruyante et que seule la mort est silencieuse : bruits du travail, bruits des hommes et bruits des bêtes. Bruits achetés, vendus ou interdits. Rien ne se passe d’essentiel où le bruit ne soit présent. « 

Jacques Attali : « Bruits » Puf

Le feu sonore

Le Pyrophone permet l’écoute de la vibration des flammes. Composition : Michel Moglia
Pyrophone Solo. Photo : Michel Moglia
A l’écoute des vibrations de la flamme. Photo : Michel Moglia
L’air chaud issu des brûleurs ne parvient pas à se mélanger à l’ai froid du tube : Il en résulte une onde stationnaire qui met en vibration la colonne d’air, en fonction de la longueur de chaque tube.
Photo: Michel Moglia
Orgue à feu manuel Photo : Montserrat Torrents

L’esprit du Feu

« Avec les sculptures sonores de Michel Moglia s’ouvre une histoire de souffle et de feu, de sirènes et de dragons, de lumières et de chants. Depuis plus de vingt ans, ses Orgues de feu illuminent les nuits des villes de France et d’ailleurs, crachant au ciel leurs sonorités fantastiques.

Avant la découverte des possibilités sonores du feu, le parcours de Michel Moglia a démarré par quinze années d’étude de la flûte traversière classique, puis par l’apprentissage de la flûte peule du Sahara. Il a également été durablement marqué par sa découverte des danses de possession rituelles, lors d’un séjour de deux ans effectué au Niger au titre de la coopération. Ces différentes influences l’ont rapidement entraîné à remettre en question les concepts d’harmonie ou de beauté inhérents au monde musical occidental contemporain. « J’ai décidé un jour d’organiser ma propre vibration, mon propre chant, au sein du monde sonore foisonnant de notre planète, notamment par l’usage du feu qui brûle en nous et organise notre respiration. Le feu est passionnant parce qu’il est à la fois le Bien et le Mal. Selon Gaston Bachelard : « Le feu brille au Paradis et brûle en Enfer ».

De cette passion pyrotechnique naît en 1989 le premier Orgue de feu, basé sur un procédé permettant de transformer la chaleur d’une flamme en énergie sonore. Concrètement, il fonctionne grâce à une série de brûleurs, alimentés au gaz, qui projettent des flammes à l’intérieur de tubes en inox, fixés sur une structure métallique. La vibration de l’air chaud dans les tubes produit des signaux sonores qui évoquent étrangement le cri de certains animaux, réels ou imaginaires, tels le hurlement des loups, le chant des sirènes ou le rugissement des dragons.

Pour son concepteur, plus qu’une simple sculpture, l’Orgue de feu est d’abord une interface entre l’univers sonore et le monde du vivant. J’aimerais qu’elles comblent en partie cette forme de chaînon manquant entre les vibrations fascinantes du monde sonore directement issu de la Nature, – chants des oiseaux, des loups, des baleines par exemple – et les manifestations sonores humaines. »

En 1990, un Orgue de feu géant, fabriqué avec des tubes de pipeline, a vu le jour devant la centrale électrique de Dobrianka, près de la ville de Perm (Oural). Finalisée avec l’aide du Centre national des Arts Plastiques, cette performance exceptionnelle, tant au niveau technique qu’au niveau humain, a été réalisée à la demande des responsables de l’énergie soviétique, pour détourner le feu de la centrale et le transformer en sons. Ainsi est né le premier Chant thermique, unique en son genre, qui unit dans un même creuset art sonore et art visuel. Les spectacles ont toujours lieu la nuit, ou dans un lieu clos à l’abri de la lumière du jour. Ils mettent en valeur l’Orgue à feu, qui se déploie aujourd’hui sur vingt mètres de façade et neuf mètres de hauteur. Composée de cinq structures métalliques séparées, supportant environ 200 tubes inox, titane et verre de différentes longueurs et de différents diamètres, c’est une véritable « bête » de feux et de sons, un générateur de vibrations mystérieuses propres à enflammer les imaginations les plus stériles.

Outre l’Orgue de feu, la famille évolutive et informelle mise en œuvre dans les Chants thermiques  comprend également des balanciers, continuos, flûtes et souffles thermiques, manuels ou automatiques. »

Extrait du livre LES CHERCHEURS DE SON de Gérard Nicollet et Vincent Bruno (Editions Alternatives)

Le chant des loups

En plein hiver, les jeunes loups se mesurent pour établir une hiérarchie dominants/dominés. L’élection du futur couple alpha ne se fait pas dans la douceur…